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Chapitre 1


Il était une fois sur une étrange planète un curieux jeune homme, Richard Wright, et une non moins curieuse jeune femme, Helena. Helena allait mourir. C’est le fait qui est connu avant même que l’histoire ne commence, et ceci peut choquer un peu ceux qui, lisant cette littérature avec des yeux neufs connaissent déjà le dénouement. Richard Wright était très pauvre. Je voudrais vous parler par exemple de son frigidaire qu’il était obligé de payer avant d’avoir le droit de l’ouvrir, en plus du prix des aliments. Tout était taxé au domicile : la porte d’entrée, l’aspirateur, tout quoi…
  Ils allaient se rencontrer, manger ensemble dans un restaurant et devenir amis. Richard portait une bague spéciale pour ceux qui désirent faire une rencontre de ce style ; cette bague émettait une certaine vibration et, Helena de son côté possédait une bague réceptrice. A l’époque révolue où cela se passait, les crémiers avaient organisé un syndicat de lutte contre le cancer, grâce aux différentes études médicales sur le lait et les produits laitiers. Ainsi la science avait démontré que le gène responsable du cancer pouvait être combattu par certaines molécules et protéines présentes dans le lait. Pour l’instant, seuls les individus mâles et circoncis pouvaient profiter de ce sérum. Ils marchaient sur les trottoirs de la ville de Riez et ils étaient victimes de phénomènes de publicité inconsciente. Par exemple le fameux  restaurant « Chez Michel » avait l’habitude d’envoyer des signaux infraliminaires, c’est-à-dire qu’on ne pouvait pas en avoir conscience.
La rue, illuminée nuit et jour par des lampadaires spéciaux débordait de messages dangereux ; par exemple, le restaurant « Chez Michel » utilisait un code loué par une agence de rencontre pour couples, qui diffusé par les réverbères de la ville, émanait des ondes synchronisées aux bagues  mâles et femelles. Les futurs amoureux étaient ainsi grâce aux phénomènes de publicité « forcés » de se rencontrer, dans le hall du restaurant qui d’ailleurs n’était pas exactement parfait sur le plan culinaire. Arrivés à la file d’attente les deux futurs amoureux se croisaient du regard et, soudain, ils étaient obligés de s’asseoir tout seul ou, quand le regard émanait l’onde alpha, onde cérébrale et frontale contrôlée  par leur bague spéciale, s’asseoir à la même table et engager la discussion.
  Ainsi, Richard Wright et Helena firent leur première rencontre chez Michel et ils engagèrent la discussion. Le pauvre Richard Wright tomba amoureux d’Helena. Puis, choisissant un prochain rendez-vous, ils se séparèrent. Richard était paumé. C’était un puceau, et il voulait absolument avoir un rapport avec Helena. C’était un malade mental. Il faisait partie des gens qui, après avoir connu dans leur adolescence le faste et la joie, avaient tout perdu (leur gloire, leur immunité psychologique vis-à-vis de la dépression, leur spontanéité). Il faisait partie de ces névrosés qui après avoir connu l’amour platonique, étaient devenus débiles sur le plan amoureux, au point de faire des complexes d’impuissance à cause de leur pucelage, et ne désiraient plus qu’une chose : enfin faire l’amour.
  Ils se revirent dans le restaurant « Chez Michel », rencontre spéciale, rencontre organisée pour un malade mental et une femme destinée à mourir. Mais la personne la plus malheureuse des deux était bien Richard Wright. Et les premiers ennuis commencèrent pour Richard. Il était paranoïaque… Les personnes qu’il croisait du regard et qui parlaient autour de lui faisaient peur. Par exemple, alors que  cela ne lui était jamais arrivé, des personnes le montraient du doigt et échangeaient des messes basses. En réalité, il haïssait les restaurants. Il haïssait le restaurant « Chez Michel », malgré le fait d’avoir rencontré éventuellement une amie, sa future fiancée peut-être.

Or elle allait mourir, le crémier jouerait son rôle, et Richard serait traité de « pauvre andouille ».

 Un jour, alors que Richard regagnait son minuscule appartement, la porte d’entrée refusa de lui obéir. En effet, il devait payer pour entrer chez lui, et le robot lui dit : « Je ne veux pas vous ouvrir ». Il faut dire que Richard insista longtemps, mais la porte ne voulait pas lui faire crédit. « Je n’ai pas un sou ».Après une heure de tentatives la porte céda. Parvenu à rentrer chez lui, il s’allongea sur le canapé et passa de longs moments à faire de l’introspection.  

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Chapitre 2

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Il allait faire le grand jeu… Il avait l’appartement, il avait le langage, il aurait Helena.   Il mit sa bague et sortit dans  la rue, à la recherche de son amie.

Dehors tous les réverbères étaient en activité. Partout des gens allaient en recevant des messages publicitaires, et les commerces foisonnaient. Les restaurants aussi fonctionnaient.
  Or, si à ce moment précis Helena était dehors et mettait sa bague, ils allaient se mettre sur la même longueur d’onde, ce qui arriverait, et ils se rencontreraient. Ainsi, sans même se donner rendez-vous, les amoureux de la belle ville de Riez pouvaient se trouver. Il y avait le restaurant « Chez Michel », il y avait la rue, il y avait les signaux infraliminaires. Tout concordait à l’harmonie, la grâce et la pureté. Helena était une femme extrêmement belle. C’était l’élue avec son visage pâle et ovale, ses traits ondulants comme une chevelure, elle était de taille moyenne, elle avait de l’assurance dans le regard, et sa bouche aux lèvres parfaites exprimait l’énergie.
  En face du restaurant, enfin, ils se reconnurent. Il dit : « Il y a des aristocrates partout… », pour engager la conversation. «  Là, tous les gens que nous voyons sont des richards… » et, de temps en temps il regardait Helena pour voir si elle l’approuvait.
  Tout en continuant de parler des aristocrates de la belle ville de Riez, ils sortirent du restaurant et il essaya de lui prendre la main.

Richard avait tout gagné…
  C’était un dragueur professionnel…   Aucune fille ne lui résistait…

Or, si jamais la bague magique qu’il avait entrait en corrélation avec la bague d’Helena, cela jouerait un rôle…
  Nous, les pauvres humains, sommes limités dans nos perceptions, mais il arrive que, avec la concordance des astres, nous puissions recevoir une sorte « d’accord » avec des constellations situées à des milliers et des milliers d’années-lumière…
  Puisqu’il voulait absolument la fille et qu’il avait fait les premiers pas en enclenchant sa bague magique, puisque Helena avait répondu elle-même en enclenchant sa propre bague, lui, le fou, avec sa dépression, avec son désespoir, lui, le malade mental aurait droit au baiser, le fait de poser ses lèvres sur celles d’Helena. Le baiser qui est le premier pas vers l’amour, le baiser, qui en se manifestant aurait le super pouvoir de communiquer avec les Grands Etres, ceux qui ont peuplé l’espace et le temps bien avant l’arrivée de la race humaine, qui envoient des signes aux pauvres mortels que nous sommes en cette époque ultra moderne, puisque nous avons fait un pacte avec ceux-là qui vivent en écoutant chacune de nos pensées, et qui, avec le commerce terrien se sont implantés sur nos bijoux dans des cristaux optiques et stellaires…
  C'étaient les bagues les plus sophistiquées qui n’aient jamais existé depuis l’aube des temps et les premières manifestations des primates que nous sommes et que nous resterons toujours, et depuis toujours…

 Il lui prit la main et elle accepta de venir chez lui.

Quand ils furent ensemble allongés sur le canapé, Helena eut sa crise, et elle se mit torse nu en montrant ses seins. C’étaient de beaux seins bien alléchants ; elle voulait absolument se faire mordre, elle criait  « mords moi, mords moi » mais il n’osa pas. Il n’osa pas lui mordre ses mamelons gonflés et bien dessinés et c’est ainsi qu’ils n’allèrent pas plus loin et qu’ils furent amenés à se quitter. Mais Helena allait mourir…

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Chapitre 3

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Il y avait, à côté de chez le crémier un endroit fort mystérieux et jusque-là un terrain inexploité, un terrain vague un lieu que connaissaient mal les deux jeunes gens, et ainsi, en sortant de chez Richard ils voulurent acheter quelque chose chez ce commerçant, pour en savoir plus.
  Ils dirent : « Qu’est-ce qu’il y a dans ce terrain vague ? ». Réponse du crémier : « Rien, je vous assure ». En sortant,  ils virent une plaque d’égout et décidèrent de l’ouvrir pour entrer sous terre. Richard dit à son amie : « Vas-y, je te suivrai. ». Le crémier dit : « J’y vais, je vous suis.»
  Ainsi Helena descendit dans le commencement de l’enfer, suivie du crémier. Richard resterait à la surface aux aguets, prêt à signaler tout message à Helena et au crémier.
  Les premiers cris vinrent du crémier : « Au secours, au secours, il y a des monstres ! » Richard hurla : « Quoi ? Je n’entends rien… » Puis, (était-ce le crémier ?) une voix gutturale prononça ces paroles : « PAUVRE CRETIN, HELENA EST MORTE ! »
  Il reprenait progressivement conscience. Il avait dormi plusieurs heures. Il vit une boîte de médicaments vide et le doute le prit. Est-ce qu'il avait rêvé ou cela était-il bien réel ? Une vision des pires cauchemars ! Il pensait réellement être allé dans les sous-sols, il croyait réellement qu’Helena avait été engloutie par des monstres. Pris de panique il se remémorait la voix gutturale « HELENA EST MORTE ! ».
  Au moment du réveil il avait perdu la notion du temps. Il ne se rappelait plus la date. Il voulait savoir si le crémier était encore en vie. Il fallait qu’il sorte. Il devait absolument retrouver le crémier et lui poser quelques questions : « Où est Helena ? Que fait-elle ? Pourquoi y avait-il des monstres ? ». Au moins s’il retrouvait le crémier ce serait une preuve.
  Furtivement il sortit de chez lui en allant en direction du crémier. Par chance sa boutique était ouverte. « Ah ! Chouette » se dit-il « le crémier est toujours en vie ». Satisfait, il demanda l’heure à un passant. Puis il lui demanda la date. Le passant lui répondit  «  Samedi 14 janvier .Mais que vous arrive-t-il ? Vous avez perdu la mémoire ? ». Samedi 14 janvier… Mais c’était un vendredi 13, la veille… Cela troublait Richard Wright, lui qui n’était pas superstitieux. Donc maintenant sa curiosité était à son comble, il fallait qu’il retrouve Helena. Il mit sa bague magique et sortit dans les grandes rues de Riez. Il se dirigea vers les restaurants, et au moment où il passa devant le restaurant « Chez Michel » il rencontra de nouveau Helena :.

-    Ah Helena ! Mon amour ! Ma chérie ! Où étais-tu passée ? Tu sais, hier j’ai fait un sacré cauchemar ! J’ai cru que tu avais été dévorée par d’horribles créatures dans les égouts, pas loin de chez le crémier ».
-    C’est parce que c’était un vendredi 13 » lui répondit-elle, « le vendredi 13 porte malheur. »  -  Oui c’est vrai. J’ai fait un cauchemar, le vendredi 13 doit y être pour quelque chose.   Quelles sont les autres choses qui portent malheur ? » hasarda-t-’il. « Passer sous une échelle ? Rencontrer un chat noir ? Tu as déjà rencontré un chat noir ? demanda-t-il. Elle répondit :
-    Je ne suis pas superstitieuse. Cela m’est déjà arrivé mais je ne suis pas superstitieuse.
Continuant la discussion, Richard Wright donnait des signes de grande agitation. « Je suis anxieux,

dit-il, oui , vraiment je suis anxieux. Il faudrait que je voie un spécialiste pour lui parler de cette hallucination avec toi ; que je lui dise ce qui constitue mon trouble. Ai-je donc rêvé ? Pourquoi

simplement ai-je cru que tu avais été dévorée par des monstres dans les sous-sols, et que signifiait cette phrase : PAUVRE CRETIN HELENA EST MORTE ? »
- Pauvre andouille, rétorqua-t-elle. Tu ne comprends jamais rien, toi. Il va falloir que tu te fasses soigner. » C’est ainsi que Richard Wright fut traité de pauvre andouille.

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Chapitre  4

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La belle ville de Riez brillait de tous ses feux. Le soir approchait. Bientôt Richard allait vivre une nouvelle aventure. Proche de la mer et des grandes plages il y avait une grande bâtisse, une église poussiéreuse et abandonnée.
  Quand vint la nuit, après avoir sommeillé trois heures, Richard entra en catalepsie. Sortant de chez lui, les yeux à moitié fermés, les deux bras en avant, Richard marcha longtemps dans les rues de la belle ville de Riez et finalement se dirigea vers cette vieille église abandonnée. Franchissant le portail qui clôturait un minable jardin fait de plantes drues et négligées, Richard pénétra dans l’église elle-même. Des bougies étaient allumées dans le sanctuaire près de la nef et un homme étrange, un prêtre, récitait  des formules maudites et difficiles à analyser. Richard écoutait, dans un demi-sommeil. Soudain le prêtre hurla la pire de toutes les formules de magie noire : « EKO MARIA JESHET ENITE MOSS ».
  A ce moment, il y eut un coup de tonnerre et l’éclair curieusement vint après. Le prêtre sourit et toute l’église fut envahie d’une sorte de crépitement lumineux, une énergie diffuse avait envahi la nef ; toute l’église fut illuminée quelques secondes. Richard se réveilla. Il sortit de sa crise de somnambulisme et tout étonné, se demanda ce qu’il lui était arrivé.

  Il quitta l’église tout penaud et ivre de perplexité prit le chemin du  retour.


Il prit la décision de parler de cette aventure à Helena, cet étrange crépitement, sa crise de somnambulisme, les mots du prêtre « EKO MARIA JESHET ENITE MOSS »  qui avaient fait venir le tonnerre et cet éclair bizarre après, non conforme, qui lui posait le problème d’aller « à rebrousse-temps ». S’il réussissait à tout transcrire à Helena, il aurait peut-être une chance de comprendre, une chance de s’en sortir, malgré l’insulte « pauvre andouille » que Helena lui avait faite la veille. Donc il allait y arriver, et réussirait à rationaliser la situation.
  Quand il rencontra Helena, dans le restaurant « Chez Michel », elle prit le parti de lui parler d’un éminent spécialiste, le docteur Von Pillt, qui serait capable de tout analyser. « Vois ce médecin, dit-elle. Il te sortira du pétrin. » Elle lui donna l’adresse de cet homme et il fixa un rendez-vous avec lui. Le docteur Von Pillt était un éminent neurologue, un homme plein de talent et capable de découdre le fil ténu de l’intrigue. Quand Richard Wright le rencontra pour la première fois, jamais il ne se sentit aussi heureux, jamais encore un tel soulagement ne lui était venu. Lui qui était névrosé, il était fou de reconnaissance. A ses yeux, le docteur Von Pillt était un saint, un homme juste et bon, capable de transformer le mal et les mauvaises choses en bien.
  Après avoir consulté le docteur Von Pillt, Richard Wright, célèbre névrosé, devait s’en tirer. Il prit contact avec la Bibliothèque Nationale de Paris. Bibliophile amateur, il savait que  le Necronomicon pouvait lui apporter des informations et qu'il était à Paris. Il savait qu’en interrogeant leur registres il y aurait la réponse à la formule maudite du prêtre de la ville de Riez..Il organisa un voyage à Paris pour aller à la Bibliothèque Nationale de Paris. Quand il apparut il se sentit gêné. En effet il n’était pas un autochtone et la foule, les gens, étaient hostiles ou farouches et il se rendit à la Bibliothèque Nationale de Paris non sans quelques difficultés. Il entra dans l’enceinte du bâtiment et le personnel lui demanda son nom « Richard Wright », dit-il.  « Je veux consulter le Necronomicon ».Il était à la recherche du Livre Maudit, le livre de l’arabe dément Abdul al Azred.

Curieusement, il tomba sur une invocation : « Ya Cthulhu L’Ryey wgah naphl phtagn », ce qui en Ryelan signifie : « Dans la ville morte de L’Ryey, Cthulhu rêve et attend », et non « N’est pas mort qui dort dans l’éternel, mais d’étranges éons rendent la mort mortelle », ce qu’il espérait. Il resta sur les lieux de la bibliothèque plusieurs jours ce qui lui permit de découvrir un texte sur les esprits qui l'amènerait plus tard à prononcer des formules qui feront de lui un sorcier. Très insatisfait, il fit le voyage de retour à Riez. Maussade, il savait d’avance qu’on allait se moquer de lui. Cthulhu l’attendait, celui qui rêve d’escalader les océans, et Azatoth l’illimité, ce dieu aveugle et fou qui tourbillonne au centre de l’infini.

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Chapitre 5

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Les lieux d’en dessous saluent leur serviteur.
LES LIEUX D’EN DESSOUS SALUENT LEUR SERVITEUR.          
Pour appeler les esprits, crée des colonnes de feu.
Appelle celui que tu veux par son nom.
Sept esprits composent les planètes.
Full est le maître des esprits de la Lune.
Falegh est le maître des esprits de la planète Mars
Ophiel est le maître des esprits de la planète Mercure.
Aglit est le maître des esprits de la planète Vénus.
Prêteur est le maître des esprits de la planète Jupiter.
Arathon est le maître des esprits de la planète Saturne.
Ohé est le maître des esprits du Soleil.
Pose la pierre qui plaît à l’esprit, puis, entre l’Alpha et l’Omega formule ta demande.           Est-ce un gardien ?
Est-ce une matière ?
Les gardiens sont fidèles.
Aucune tâche ne les rebute car ils n’ont point de sentiments.
Prends bien garde de ne pas ordonner un esprit plus puissant que toi.
Certaines matières sont tellement dangereuses qu’il faudrait les contenir à l’état de sel.        Si tu ordonnes correctement un esprit, tu auras le pouvoir de connaître toutes choses.        Avoir plus de connaissances que tous les livres ?
I
Ia,
Yogsothoth.     
Il me manque des éléments.
Le fluide…
Le fluide…
COMPOSE LE FLUIDE… IL EST COMME TES NEURONES.

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Chapitre 6

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Richard, pour retrouver la raison avait acquis de précieux documents. Ce qu’il ignorait était la modification « Ya Cthulhu phtagn », la phrase qu’il avait recopiée ainsi que le texte sur les esprits, apparition qui le surprenait totalement. Richard mit en fonction sa bague magique. Il espérait rencontrer Helena dans belles rues de Riez au cas où Helena elle-même mettrait sa bague sienne. Ainsi, avec le changement de son humeur et grâce au texte sur les esprits, il aurait une chance pour qu’Helena ne se moquât pas de lui. Anxieux, il voulait absolument qu’elle le crût, ou que le texte sur les esprits lui plût. Il avait peur de se faire traiter encore de « pauvre andouille »…
  Passant devant le restaurant « Chez Michel », ils se retrouvèrent et eurent une vive discussion. Helena essaya de convaincre Richard que tous ces textes ne valaient rien, et que, prenant un petit peu de repos, Richard Wright trouverait une solution idéale aux questions qu’il se posait. Car la solution idéale était cette sentence de Lovecraft : « N’est pas mort qui dort dans l’éternel mais d’étranges éons rendent la mort mortelle ». Richard regagna son minuscule appartement, le robot-serveur accepta d’ouvrir sa porte. Il s’assit sur son canapé et se mit à faire de l’introspection. Confortablement installé, les yeux fermés, il essaya de faire le vide dans lui-même. Ses sourcils étaient agités par des tics nerveux et Richard avait l’impression d’être possédé par le démon (comme si le diable était capable de s’emparer de sa volonté et de faire mouvoir ses sourcils ou même ses oreilles).Il était désespéré.
  Une lampe tamisée éclairait l’intérieur de son appartement, et la nuit allait tomber. Richard resterait seul longtemps. Il aimait la solitude. Il resterait immobile pendant plusieurs heures en tentant de ne penser à rien. 

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Chapitre 7


  Richard Wright reprenait progressivement conscience. Combien de temps avait-il dormi ? Il était resté prostré sur son fauteuil. Regardant l’heure, il vit qu’il était trois heures du matin. Il hésita. « Tiens, il ne fait pas encore jour ? Que ferai-je jusqu’au lever du soleil ? » Avec un café il s’installa de nouveau sur son fauteuil, dans la plus grande hébétude. « Ca alors, comment se fait-il que j’aie dormi aussi longtemps ? » Encore abasourdi, il se remémorait sa longue marche dans les rues de la belle ville de Riez alors qu’il était atteint d’une crise de somnambulisme. Il se remémorait ce qui s’était passé dans la vieille église abandonnée, l’étrange prêtre et ses tours de magie noire. Sa formule démente « EKO MARIA JESHET ENITE MOSS » et ce qui s’était produit, l’éclair fabuleux et les grésillements lumineux sur l’autel. Il ne voulait pas que cela se reproduise. Il ne voulait pas repartir à l’aveuglette et marcher de nouveau sous hypnose. Il prit un nouveau  café, puis sortant une pipe de sa poche, il la bourra et la fuma. Humant les bouffées sulfureuses, il se mit à réfléchir. Les volutes de sa pipe se répandant dans la pièce, l’odeur se dispersait partout, puis il en fuma aussitôt une deuxième.
  La pipe de Richard Wright était particulière. C'était une belle pipe à opium fine et ciselée. Il mettait un peu de mélange et après, il recevait d’agréables et surprenantes  sensations. Il avait l’impression que tout devenait obscur, c’était une hallucination. Puis, il entendait battre son cœur. Très exactement  c’était dans le lointain. Il entendait « poum, poum »,  « poum, poum », « poum, poum », et  il ignorait ce que c’était, d'où ça venait,  mais c’était son cœur et cela prit un temps fou avant de lui apparaître. Au bout de trois quarts d’heure l’hallucination s’estompa et jamais, au grand jamais il ne s’était senti aussi heureux. Jamais une telle  chose ne lui était arrivée et cela marquerait une trace puissante dans ses neurones.
  Après ses deux pipes, il prit un nouveau  café et son anxiété disparut. Enfin, il avait pris sa dose. Tout imbibé d’une odeur de vieux café et de mélange, il se sentait mieux. « Ah, chouette, je n’aurai pas à consulter ce neurologue, le docteur Von Pilllt », se dit-il.
  Pour se dégourdir un peu les jambes, il arpenta les chambres de sa maison. Il alla ainsi dans la bibliothèque, puis, curieux de consulter ces vieux livres, il prit deux ou trois ouvrages fabuleux : « Le culte des goules » du comte d’Erlette « Le livre interdit de Von Juntz (Das unaussprechlichen Buche), et le Malleus Maleficarum. Portant plus loin ses recherches il trouva « Le testament de L’Ryeh », un des livres les plus rares du monde. Il l’avait en sa possession, rivalisant ainsi avec la  Bibliothèque Nationale de Paris.
  La lettre de l’Ryeh était ainsi conçue : « Ya Cthulhu, L’Ryeh wgah naphl phtagn », ce qui, en Ryelan signifie : « Dans la ville morte de L’Ryeh, Cthulhu attend et rêve. ». Pourquoi le testament de L’Ryeh était si court ? Pourquoi était-il constitué d’une seule phrase ? C’était un mystère.
  Dans le passé antique de Rome il yavait un continent englouti : l’Atlantide. La bonne question serait de se demander si Cthulhu que l’on peut prononcer « Shoulou » ou « Klut lux » plutôt que Cthulhu ( Quelle est votre prononciation favorite ?) Celui qui rêve d’escalader les océans était lui-même l’auteur de la disparition de l’Atlantide. Les historiens de la mythologie romaine auraient pu se poser la question sur l’histoire antique de Pompéi : Est-ce que le volcan qui avait détruit Pompéi était en réalité une manifestation de Cthulhu ?

 Richard Wright rêvait. Ses rêves étaient tantôt cauchemardesques, tantôt des bribes de la réalité. Il avait rêvé qu’il avait visité une ville, et s’était égaré ; cherchant son chemin il avait suivi les conseils d’un homme qui lui avait donné des indications trompeuses ; c’était un rêve prémonitoire. Dans la grande ville de Riez, si Richard se lançait à l’aveuglette pendant la nuit, il perdrait son chemin et se suiciderait peut-être ; si Richard était somnambule et qu’on le réveillait durant sa marche nocturne, cela pourrait lui causer un traumatisme, ainsi réveillé, il pourrait mourir d’une attaque cérébrale ou entrer en catalepsie. Les troubles ainsi causé sont suspects et méritent une vigilance médicale.
  C’était un dimanche. Richard était heureux. Il avait dormi tout son soûl et ce matin il faisait beau. Humant sa bonne pipe, se délectant du petit déjeuner, Richard préparait son emploi du temps pour la journée. Il espérait rencontrer Helena. Bien entendu, elle le traiterait de « gras cochon », mais mis à part cette insulte, il prévoyait une rencontre amoureuse. Avec la bague magique, il rencontrerait Helena. Si elle-même utilisait sa bague sienne, les amoureux se promenant dans les rues commerçantes tomberaient victime des publicités cathodiques, et le restaurant « Chez Michel », spécialiste pour les rencontres pour couples favoriserait leur union.

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Chapitre 8

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Près de la belle ville de Riez, la campagne était verdoyante et fleurie mais se rapprochant de la demeure de Richard Wright la végétation se raréfiait et les herbes folles proliféraient de plus en plus. Depuis ses lectures à la Bibliothèque Nationale de Paris, Richard était en passe de devenir sorcier, sa maison s'était peu à peu transformée.  Quelque chose de maudit avait frappé la demeure du héros, et les sols étaient marécageux, humides et remplis de bêtes. Des crapauds, des lucioles, des couleuvres et engoulevents hantaient les lieux. Leurs chants commençaient au moment où la nuit tombait et on pouvait apercevoir dans le ciel dégagé une lune immense et pleine. Richard vivait seul, reclus dans sa maison ; avec ses angoisses et ses peurs il construisait des petites fioles dans lesquelles il enfermait des esprits, des âmes, des petites boules de lumière qui remplissaient plusieurs étagères de sa cave. Dans une pièce sa bibliothèque immense remplissait tout un pan de mur et derrière il y avait une ouverture secrète qui communiquait avec sa cave. Pour y pénétrer il y avait un panneau coulissant qu’il fallait actionner en utilisant un faux livre dont la reliure paraissait normale à première vue. Puis, en tirant un contact, s’opérait un mécanisme bien dissimulé. Le mur s’ouvrait et ensuite, des marches conduisaient au sous-sol. Dans un lieu obscur Richard entonnait des formules magiques.

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Par le pouvoir du glaive
Si des âmes sont amies
Si des esprits sont complices qu’ils viennent
Qu’ils parlent qu’ils chuchotent
Ou qu’ils hurlent
Alors cinq fois
Le parchemin de Nodens
Le seul des grands anciens à être nommé
Les contiendra
Les emprisonnera
Les réduira à l’état de sels
Car leur heure est venue.

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Puis, après cette incantation, des boules de lumière venues de nulle part traversaient l’espace et chacune d’entre elles se rangeait dans une fiole. Dès que l’une d’entre elles entrait dans un flacon, Richard mettait un bouchon et l’esprit ou l’âme était capturée. Ensuite, Richard remontait les marches menant à sa bibliothèque. Une fois dans cette chambre, il refermait le livre qui lui servait de trompe l’œil. C’était l’aube. La lune disparaissait, les cris des animaux se raréfiaient et se calmaient. Richard avait terminé son travail de magicien. Ce qu’il faisait était hallucinant. En effet, aux yeux du commun des mortels, il ne pouvait que se cacher et agir dans l’ombre, refusant toute visite. Car s’il était pris, il risquait de se faire condamner en tant que sorcier, ce qu’il craignait.
  Des voix également se manifestaient. Chaque voix correspondait à une touche de son piano. C’était un beau piano : un piano à queue comme il n’en existait pas, une rareté. L’invention de Richard était de communiquer avec les esprits contenus dans les fioles. Chaque esprit avait une voix. Ainsi pour en avoir une, il frappait une touche de son piano et la voix parlait : « Je suis telle personne. » Ce que Richard ne savait pas, c’est qu’un piège l’attendait. Une des touches de son piano était sa voix à lui. Il la frappa et  un événement paranormal se produisit. Son esprit fut convoqué. La fiole était prête et Richard se rapetissa. Il se transforma en boule de lumière, se fit aspirer dans la fiole et mystérieusement le bouchon se referma. Ainsi Richard fut puni en tant qu’esprit et en tant que

sorcier. Le terrible parchemin de  Nodens avait agi sur lui. Comme Richard n’avait pas d’ami, personne ne pourrait le délivrer.

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Chapitre 9

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Richard Wright reprenait progressivement conscience. Tout ce dont il se souvenait, un horrible extra-terrestre, une touche de son piano qu’il fallait actionner, c’était une voix « Je suis telle personne », « Je suis Richard Wright », « J’existe ». Et voilà que peu à peu il revenait à la vie. Il y a des noyés qui reviennent à la vie. C’est comme un sommeil prolongé qui prend fin, un rêve interminable qui s’arrête, un long corridor que l’on doit traverser entre la vie et la mort, et, quand le noyé respire à nouveau, quand enfin le corps arrive sur la rive, après avoir séjourné longtemps dans l’eau, alors les paupières s’ouvrent  à nouveau, on voit le monde une fois encore et c’est une nouvelle naissance en quelque sorte. Une nouvelle existence commença alors pour Richard Wright. IL ETAIT SORTI DE SA FIOLE…
  Sur l’autel du temple de l’église de Riez, la belle ville, le prêtre fou faisait des homélies. Certaines de ses incantations étaient imprononçables. « Par Yogsothoth l’illimité » disait-il            «  Par Fungi de Yuggoth, par Nyarlathotep, le chaos rampant, par UMR-AT-AWILL, celui dont la vie a été prolongée. N’est point mort qui peut éternellement gésir. Au cours des âges même la mort peut mourir. » (le distique de l’arabe dément Abul Alhazred).
  Ainsi la résurrection de Richard Wright fut prononcée. Le coeur de Richard battait « poum poum », « poum poum », « poum poum », mais aucun de ces battements ne prononçait  le nom des anciens car le  c?ur est stupide.
  Ah ! Enfin, je suis sorti de ma fiole. Richard Wright était très heureux. Il comprenait que maintenant, le monde lui appartenait. Il avait réussi à le faire, donc d’autres miracles l’attendaient. Il souriait et voulait les accomplir, pensant qu’il était très doué. Son amie Helena serait charmée. Il partageait ces plaisirs avec elle. Il l’inviterait au restaurant, payant avec sa bague magique. Tout était permis maintenant que ces événements fantastiques s’étaient produits. « Ma chère amie, ma chère amie je t’aime et je t’adore » pensa-t-il et il mit en fonction sa bague magique. Dans les belles rues de la ville de Riez tous les réverbères étaient allumés. Les gens qui marchaient dans la rue étaient guidés par les panneaux publicitaires à émissions cathodiques. Allez au restaurant « Chez Michel », disait la publicité par  messages infraliminaires. Ils y allèrent, comme la première fois qu’ils s’étaient rencontrés.

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